Javier Gómez Noya : «Ça a été la meilleure saison de toute ma vie »

Sa force mentale est son atout majeur. Discipliné, tenace et méthodique, Javier Gomez Noya vit un moment sportif en or. Nous l’avons interviewé alors qu’il recevait le Prix National du Sport décerné à l’athlète espagnol se distinguant à l’échelle nationale et internationale par ses performances sportives. 17 ans se sont écoulés depuis sa première compétition mais l’enthousiasme du galicien reste intact et il est le vibrant portrait de la passion pour le triathlon.

À des séances d’entraînement extrêmement exigeantes, il faut ajouter une combinaison génétique propice aux records. Gómez Noya, a du talent. À ses 31 ans, son palmarès en témoigne. Son nom est associé à la réussite sportive et, à travers sa discipline, à l’entreprise espagnole qui le sponsorise, Pamesa Cerámica.

Question : Que représente pour vous ce Prix Don Felipe de Borbón au meilleur athlète espagnol de l’année 2013 ?

Réponse: Il y a un certain temps, je n’aurais jamais imaginé qu’un jour j’atteindrais un tel niveau de résultats. Même dans mes plus beaux rêves !   On ne peut que se réjouir lorsque notre travail est ainsi récompensé par des prix que nous ne gagnons pas directement en course et dont l’obtention ne dépend donc pas directement de nous.  J’éprouve une grande joie personnelle, mais c’est formidable aussi pour le triathlon, car c’est une occasion de parler un peu plus de ce sport dans les médias ; cet écho est toujours bon et positif.

Q : Quadruple champion du Monde, Half Ironman, Pékin, Garmin à Barcelone, deuxième à Nice… Que pouvez-vous nous dire de cette formidable saison ?

R : Je crois que, jusqu’à présent, c’est la plus belle saison de ma carrière. La liste des victoires que vous venez de citer en témoigne, elles sont le fruit d’un travail de tous les jours. Certes, je me suis beaucoup entraîné pour y parvenir ; plus que jamais sans doute. Je suis donc très satisfait des performances et de la façon dont je les ai atteintes car j’ai beaucoup travaillé toute l’année.

Q : Et, cette saison, vous avez un nouveau sponsor, Pamesa Cerámica …

R : Oui. J’ai été très heureux que Pamesa Cerámica se joigne à mes sponsors. Cela va me permettre de préparer les Jeux olympiques avec sérénité et de grandir en tant que professionnel. J’ai un sens aigu de ma responsabilité envers mes sponsors. Ils ont misé sur moi et, quand je gagne, c’est en partie grâce à eux.

Q : Comment interprétez-vous que Pamesa Cerámica soit votre seul sponsor espagnol ?

R : D’un côté, ça m’attriste, qu’il n’y ait qu’une seule société espagnole qui croie en moi. De l’autre, et c’est ce qui est le plus important, ma reconnaissance et ma gratitude à l’égard de Pamesa sont immenses ; d’autant que ce n’est pas une marque de sport, une marque technique spécialisée dans le triathlon. Cela fait que j’apprécie encore plus.

« Le sponsoring de Pamesa me permet de grandir en tant que professionnel ».

Q : Quelles sont les valeurs qui vous ont aidé à construire ce palmarès sportif ?

R : Le triathlon est un sport extrêmement exigeant. Physiquement et mentalement. Sans effort, sans persévérance et sans sacrifices, je n’aurais pas réussi. Le chemin, pour me positionner entre les professionnels d’abord, et pour devenir champion du monde ensuite, n’a pas été facile ; le dépassement a été essentiel.

Q : Vous parlez de dépassement, comment définissez-vous cette valeur ?

R : Pour moi, le dépassement, c’est de ne jamais se rendre… quels que soient la difficulté et l’objectif ; en dépit des obstacles que les facteurs externes vous opposent. Cela requiert aussi d’être anticonformiste et d’avoir la volonté d’apprendre en permanence. Dans mon cas, ça a consisté à intégrer de nouvelles méthodes d’entraînement et de participation aux compétitions.

Q : Quel est votre point fort dans ce sport ?

R : Je crois sincèrement que mon point fort est d’être un triathlète très complet dans les trois disciplines. Je n’ai pas de faiblesse définie qui permette à mes adversaires de m’attaquer directement.

Q : Quel effet a eu sur vous la présence de deux des meilleurs athlètes de l’histoire, les frères Brownlee ? Cela vous a-t-il grandi en tant qu’athlète ?

R : Certainement. Les Brownlee ont fait de moi un meilleur athlète. S’ils n’avaient pas été là, j’aurais probablement gagné davantage de courses mais le fait d’avoir à eu à les affronter m’a obligé à m’imposer un maximum d’efforts pour m’améliorer, à étudier de nouvelles méthodes d’entraînement… à prendre des risques pour gagner. Et plus l’objectif est difficile à atteindre, plus la satisfaction est grande.

 « Plus l’objectif est difficile à atteindre, plus la satisfaction est grande »

Q : Quel est le rôle de la force mentale, dans tout cela ?

R : Je crois que, dans n’importe quel sport d’élite, c’est le facteur clé. C’est ce qui fait la différence entre devenir un athlète professionnel ou s’arrêter en chemin ; entre remporter des victoires ou n’être qu’un parmi tant d’autres. Cela dit, il faut aussi avoir, à la base, des conditions naturelles physiques et physiologiques spéciales, pour devenir un sportif d’élite. Ça n’est pas donné à tout le monde, évidemment.

Q : Quelle est la compétition dans laquelle vous vous êtes senti le plus à l’aise?

R : J’ai pris beaucoup de plaisir au Half Ironman. J’y suis venu sans pression puisque je venais de remporter l’objectif principal de l’année, le mondial ITU. Comme c’était une épreuve nouvelle pour moi, j’y ai vraiment pris du plaisir alors que je ne l’avais pas spécifiquement préparée.

Q : Quelle est la première pensée qui vous a traversé l’esprit quand vous avez été sacré champion pour la quatrième fois?

R : J’ai d’abord pensé : enfin, la course est finie! La semaine précédente avait été dure ; j’avais l’impression de n’avoir rien à gagner et tout à perdre puisque j’avais été en tête du Mondial toute l’année. À Stockholm, je n’avais pas été au top à cause de problèmes physiques… Du coup, j’avais des doutes. Mais, cela dit, une joie immense a tout de suite pris le dessus bien sûr, quand j’ai franchi la ligne.

Q : Rio est votre prochain objectif, vous sentez-vous prêt à remporter l’or ?

R : Rio est mon grand objectif à moyen/court terme. Si je ne me sentais pas capable de me battre pour l’or, je crois sincèrement que je me concentrerais sur d’autres objectifs ou d’autres compétitions. Il reste un an et demi pour Rio et je pense que si les blessures m’épargnent, je serai en mesure de me battre pour la victoire. Après… c’est la course qui mettra chacun à sa place.

Q : Comment avez-vous planifié vos séances d’entraînement en vue de cette victoire?

R : Les entraînements seront principalement ciblés sur la course à pied que je dois améliorer encore car c’est cette discipline qui décidera des médailles. Par conséquent, le travail va consister à perdre du poids sans pour autant diminuer la force. Je ne dois toutefois pas négliger les deux autres disciplines, la natation et le cyclisme. Les séances d’entraînement vont être dures aussi parce que – si ce ne sont pas des disciplines déterminantes pour gagner- elles peuvent parfaitement nous faire perdre.

Q : Est-ce que nous vous retrouverons en 2015 sur les mêmes compétitions que cette année?

R : Je vais probablement alléger un peu le calendrier des compétitions en pensant à Rio, l’année précédente est importante. Mais il est probable aussi que je dispute l’Européen. C’est une priorité à cause du modèle de compétition : se déroulant sur une journée, il est comparable aux Jeux et me servira de test pour Rio. Pour le reste, je crois que je vais faire le mondial Half Ironman et l’ITU comme en 2014.

Q : Vous avez beaucoup grandi en tant qu’athlète. Que reste-t-il du Gómez Noya qui débutait en triathlon ?

R : L’enthousiasme et la passion pour le triathlon. Aujourd’hui je suis un professionnel bien sûr. J’en vis et j’en suis très heureux. Mais, très sincèrement le triathlon reste un sport qui me passionne et que je pratique avec le même enthousiasme qu’à mes premières compétitions.

Q : Que pensez-vous de l’essor que connaît la discipline en Espagne?

R : C’est très positif ! En tant que triathlète, cela fait que plus de gens me connaissent et me suivent, et cela éveille l’intérêt des marques commerciales. Mais ce qui est le plus important, c’est que cela prouve que la société évolue vers une culture du sport et du bien-être. C’est très bon pour tout le monde. Je pense que la pratique du triathlon contribue à rendre la vie plus saine.

Q : À long terme, quels sont vos rêves personnels et sportifs ?

R : Du point de vue sportif, l’objectif qui sans doute me motive le plus, c’est l’Ironman de Kona. Je pense qu’après les Jeux de Rio, je vais me concentrer dessus. Du point de vue personnel, j’aimerais avoir des enfants d’ici quelques années.

 

 

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